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I often feel that we're all spinning slowly... like a mirror ball. Yes, we are all mirrors to each other. And so, it is the Light between us that I hope to help reveal and celebrate. /// J'ai souvent l'impression que nous sommes une boule disco qui tourne lentement. Nous sommes tous des miroirs pour les uns les autres. C'est donc la lumière qu'il y a entre nous que j'espère contribuer à souligner et à célébrer.

Tuesday, July 23, 2013

Puisque tout est politique.

Un texte pouvant peut-être sembler un peu décousu.
C'est que le fil est transparent.
N'hésitez pas à commenter!



Une amie me racontait: ''Pour moi tout est politique.  Des fois... ça devient un peu fatiguant.''

Je me dis, en effet:
J'aimerais, par exemple, savoir comment prendre le temps
de prendre soins de jeunes plantes

Parce que 1) prendre le temps est un geste radical, à contre-courant du mode compétitif effréné dans lequel se vautre notre culture économique; et parce que  2) prendre soins est un geste radical et trop peu valorisé: ça ne fait pas partie du PIB!
S'appliquer, s'engager, s'efforcer à faire émerger la vie, à fournir la juste dose de tout ce qu'il faut pour que prennent racines: c'est radical. Imaginer une production alimentaire significative à même nos milieux urbain, faire respirer la cité-bitume, semer sur les toits de nos appartements, dans les craques des trottoirs, dans nos bacs à double-fond et nos jardins grimpants...
Ça requiert tout un engagement.

Cultiver.

Naturer.

Arrêtons de prétendre que nous ne comprenons pas ce qui nous arrive. Certes, encore aujourd'hui, tous les angles ne sont pas visibles.  Mais ne pourraient-on pas rendre compte de ce qu'on a appris et de ce qu'on continue d'apprendre? Je continue de croire qu'il nous faut créer des espaces dans lesquels on se permettrait d'explorer, c'est-à-dire de ressentir, les sentiments qui se rattachent à l'Histoire.

Reconnaître notre ignorance et notre vulnérabilité en tant qu'espèce. Intégrer ce que nous avons appris depuis Nietzsche, Freud, Fromm, etc. Célébrer le chemin parcouru. Considérer les motivations psychologiques derrière la tendance réactionnaire et la puissance grégaire. Expliciter le phénomène et se donner les outils pour ne plus commettre de telles violences.  Car c'est nous-même qu'on continue de mutiler.



Des outils comme le discours critique, ou comme la compassion! Nous sommes en train d'apprendre à nous émanciper.  Nous y oeuvrons maladroitement depuis 2500 ans (avénement de la philosophie occidentale. Le processus émancipatoire tient sans doute de bien plus loin...) L'apprentissage est là, étape par étape.

Ce qui me fait penser... aux Lumières!


Par exemple, pourquoi ne pas outrepasser la philosophie des Lumières? Questionner le libéralisme, la science moderne, le capitalisme industriel... l'État!  La philosophie des Lumières, ce n'était pas l'aboutissement de l'histoire, la ligne d'arrivée!  Pourquoi ais-je l'impression que ''la société en générale'' en est demeurée avec les idôles de ce temps? ''Liberté, raison, ... égalité''.  Le culte de l'individu et de sa supposée raison!  Démocratie?  ''Droit fondamental''?  Pourrait-on seulement continuer de porter une pensée critique sur ces Idées ?

Je ne suis pas la première à dire vouloir rappeler le lien qu'il existe entre l'État moderne et nos pires cauchemars: holocauste, hiroshima, génocide au Rwanda, corruption, violence policière, etc.  La justice et la liberté n'existent qu'en Idée. C'est autre chose qu'on choisit, il faut arrêter de se leurrer.  J'appellerais ça le Sentiment de Sécurité?

On le voit bien qu'il faut questionner!  On le sent, et c'est pour ça qu'on s'entre-mêle dans des tirades émotives et des rassemblements de peuple - tant de phénomènes que nous le savons voués à nous faire perdre la raison.

Rassemblons-nous alors!  Je sais que plusieurs philosophes contemporains sont derrière moi, entre autre parce pour ce qu'ils ont influencé ma vision du monde : Le sauvage, le non-ordre, le courant libre et créatif.. tout ça se doit d'avoir une place dans nos vies!
C'est dommage que la société québécoise du spectacle ait co-opté tout ça.



Le carnaval existait bien longtemps avant le cirque du soleil, le festival de Jazz de Montréal. Le carnaval existait avant Jésus-Christ, avant les Romains, avant Gilgamesh! Peut-être parce que l'être humain a bel et bien besoin de ces rites (de purification?), de cette intoxications, de cet ex-stasie (hors d'état).  C'est nécessaire, pour l'équilibre des choses.

Il y a une charge, une énergie, qui coure et constitue le flot des choses.  On ne perçoit que les presq'équilibres; on n'en sent que la tension, que la réverbération d'un mouvement minuscule qui devient séisme dès qu'on arrête de se tenir occupé.

Pourquoi, à quoi résister?
Quand on s'arrête de bouger, le cosmos lui tourne encore.
Résister au changement? Résister au status quo?
Les deux forment un tout.
(Y aurait-il un tierce élément à considérer?)

Bref.


Notre sensibilité est palpable.

Alors pourquoi nier?  Pourquoi tout enfouir?  Nos déchets et nos échecs, notre incapacité à gérer l'affaire. Les dépotoirs comme l'ombre de nos Lumières. Du matériel inconfortable à gérer, dont on préfère rester inconscient. Un barrage mental - qui a servi sa fonction - prêt à exploser.







''Je ne pense pas que je sois si politisée que ça''.
Mon amie était surprise.
 - ''Toi? Une fille qui étudie et qui va enseigner la science politique... et qui n'est pas politique!...Ah!''
On a bien rit.

Les cégeps existent depuis 46 ans.
Avant, la grande majorité des francophones du Québec
ne poursuivaient pas d'études au-delà du secondaire. Qu'est-ce qu'on a appris ?
Bien sûr que je suis politique.  Comme toi, je vois un système et je suis curieuse de le comprendre. C'est seulement qu'il y a quelques années j'ai aussi compris que mon intellect et mes efforts de logique servent d'abord à apaiser un feeling.  Je ne suis pas la seule.  Il faut en parler.

Tout est politique.

Alors je choisis de vivre en communauté et de chercher à définir le sens du terme, de créer des espaces de croissance et d'émancipation, d'enrichissement et de résilience.


Qu'il est sublime de voir un plant de haricots spiralé son chemin vers la lumière!







Wednesday, July 10, 2013

L'institut du nouveau monde, sur l'enseignement postsecondaire

L'institut du nouveau monde (INM) s'apprête à ouvrir son école d'été.  En furetant sur le site internet, j'y découvre une conversation intéressante sur l'enseignement postsecondaire au Québec... Ce qui est rafraîchissant, c'est qu'on y parle pas seulement d'argent, de financement et de gestion.  Finalement, voici un début de conversation sur la pédagogie...

Par ailleurs, je suis en train de mijoter sur un nouveau blogue qui sera concentré sur la pédagogie.  À surveiller dans les prochaines semaines..


Regard philosophique sur l’enseignement
Retour sur une expérience formatrice
Louis Dugal – pour l’INM – Juin 2013

Le comité de travail a pu bénéficier pour une deuxième fois de la présence du professeur de philosophie Louis Dugal, afin d’approfondir la réflexion de nos expériences dans le parcours scolaire québécois. Il faut se remémorer que dès la première rencontre, M. Dugal nous a amené à entrer dans le "senti" que nos expériences scolaires nous ont fait vivre afin d’y identifier les éléments marquants, dans le but de pouvoir en dégager les éléments de valeurs communes que nous désirons partager avec cette Charte.
Dans cette deuxième session de travail avec M. Dugal, ce dernier nous a présenté la mise en commun des conditions (qu’est-ce qui a participé à rendre notre enseignement possible) et des perspectives (ce que notre enseignement rend possible) de notre réflexion individuelle.

Plusieurs éléments ont été identifiés par rapport à la scissure entre le primaire/secondaire et les études post-secondaires. Les études primaires et secondaires de par leur caractère obligatoire, ne permettent pas la prise en charge de l’individu par soi-même. L’individu est près de sa communauté, où il passe de la valorisation parentale à communautaire (amis, professeurs, société). Il arrive trop souvent que les étudiants qui entament des études post-secondaires sont peu préparés à vivre cette expérience marquante : la séparation de son milieu d’origine (beaucoup d’étudiants doivent s’éloigner de leur région natale pour pouvoir continuer leurs études) ainsi que le manque de préparation au niveau méthodologique (trop d’insistance sur le "quoi" et pas assez sur le "comment" lors des études fondamentales) brusquent le passage du secondaire au collégial. À ce stade-ci, du collégial jusqu’aux études doctorales, les notions d’autonomie, de devoir envers la société, ainsi que la justification de l’apprentissage au niveau des impacts sociaux prennent de l’importance.

En passant par l’exercice de réflexion individuelle, nous avons pu constater que souvent ce que nous avons cru être une expérience unique et parfois difficile de l’éducation, était en fait une expérience partagée par la majorité des membres du comité de travail. Cette déduction nous a poussé à se questionner sur la représentativité de nos expériences au niveau de la population. Peut-on partir de notre expérience pour déduire celle des autres? Comment peut-on arriver à trouver impressions partagées par des centaines de jeunes au Québec?

La Charte sera publiée sous peu et nous attendons vos commentaires avec enthousiasme. Que diriez-vous de débuter l’exercice avec quelques expériences personnelles de votre parcours dans le système d’éducation québécois? Qu’est-ce qui vous a marqué et quelles sont les conditions cruciales de votre réussite jusqu’à maintenant?

Partagez-nous vos expériences en commentaire sur cet article, ou par courriel au chartejeunesse@gmail.com !

Monday, July 8, 2013

Mes bouquins, suivi de Rimbaud

Je suis debout devant ma bibliothèque et je regarde mes livres.  Je fais souvent cela. C'est un geste chargé..
Je regarde tous ces titres, ces ouvrages, ces richesses... et je flirt avec l'abysse tentation de plonger dans un verre d'eau à moitié vide: comment pourrai-je jamais mémo... absorber tout ça ?!

J'ai passé les sept derniers mois à réfléchir sur la pédagogie, l'apprentissage, la cognition, ''l'acquisition de connaissances''... la méta-cognition.  (Finalement un nom pour ce qui me passionne... m'enfin, l'une des choses qui me passionnent...).  





J'ai toujours aimé étudier le contenant en même temps que le contenu.

Comment aider les étudiants à apprendre? Pardon! Je devrais plutôt dire ''à développer des compétences''?  Pour ça, j'ai des tonnes d'idées!
D'ailleurs, j'aurais tellement voulu pouvoir tenir mon blogue durant les sept derniers mois passés au microprogramme en enseignement! Parce que j'en ai eues des réflexions et des réalisations! J'en ai eues... des bribes de révolutions. 
Le temps, l'espace, et ma psyché ne m'ont pas permis de tenir journal.  J'ai préféré laisser mijoter en me disant que je finirais bien par créer un nouveau blogue dédié à la pédagogie.

Mes puisque l'intention qui alimente Fool of Love est d'être et de partager l'ensemble de mes expériences autant émotives/affectives que réflexives/analytiques, je me permets cette fois à nouveau d'explorer et de laisser place à ce moi décousu.  

Je fais l'inventaire de mes bouquins. J'en ai lus la plupart, au cours les dix dernières années. Ces bouquins, ils ont contribué à faire l'être que je suis aujourd'hui.

Assise devant ma bibliothèque.  J'imagine enseigner la philosophie...

Comme j'aimerais pouvoir mémoriser tout ça!
Pouvoir en discuter avec éloquence
Par exemple.
Épistémologiquement parlant, 
vous raconter tout ce que je comprends;
Ou empiriquement... tout ce que je ressens.
Empiriste ou rationnaliste transcendantaliste?
Phénoménologiquement, définitivement, existentialiste.
L'Anarchisme est-il/elle vraiment un humanisme?

D'avoir lu toutes ces oeuvres... Pour me construire un monde.  Pour me représenter ''le monde''.
Comme j'aimerais pouvoir expliquer tout ça! 



Je compte bien élaborer davantage sur le thème de la pédagogie, sur les contenus et sur les contenants, et sur les vases communicants.

Mais pour ce soir, une pause.  On dira que c'était une introduction.


Parmi mes livres...

Poésies d'Arthur Rimbaud 
(Derniers vers/ Une saison en enfer/ Illuminations) 
Édition parue au Livre de Poche, Librairrie Générale Française, 1972. 


Extraits donc, d'un poème de Rimbaud.

Pour Annabelle,
 et pour Guillaume.
Et pour la poésie, oubliée.



Comédie de la soif

1. Les parents

Nous sommes tes Grands-Parents
 Les Grands!
Couverts des froides sueurs
De la lune et des verdures.
Nos vins secs avaient du coeur!
Au soleil sans imposture
Que faut-il à l'homme?  boire.

Moi - Mourir aux fleuves barbares.

Nous sommes tes Grands-Parents
    Des champs.
L'eau est au fond des osiers: 
vois le courant du fossé
Autour du château mouillé.
Descendons en nos celliers;
Après, le cidre et le lait.

Moi - Aller où boivent les vaches

Nous sommes tes Grands-Parents
    Tiens, prends
Les liqueurs dans nos armoires;
Le Thé, le Café, si rares.
Frémissent dans les bouilloires.
--- Vois les images, les fleurs.
Nous rencontre du cimetière.

Moi - Ah! tarir toutes les urnes!


2. L'Esprit

Éternelles, Ondines, 
     Divisez l'eau fine.
Vénus, soeur de l'azur, 
      Émeus le flot pur.

Juifs errants de Norvège,
    Dîtes-moi la neige.
Anciens exilés chers, 
    Dîtes-moi la mer.

Moi- Non, plus ces boissons pures;
        Ces fleurs d'eau pour verres;
Légendes ni figures
        Ne me désaltèrent; 

Chansonnier, ta filleul
        C'est ma soif si folle,
Hydre intime sans gueules
       Que mine et désole.

(...)
p.141-42

Monday, July 1, 2013

Road Trip en Gaspésie!



Une semaine d'accumulation de vermeilleux moments. Ou, dans les mots de la dame qui nous a jazé sur le quai de Marsoui: pure grâce.


Trop pleins donc mes esprits pour que je puisse vous raconter en détails.. quoique j'aurais aimé.


Je vous offre quelques milles mots sous forme d'images...


Un rosé frais, ça goûte le coucher de soleil aux abords du fleuve.


...


La première phase de l'aventure fut de longer la rive sud du fleuve avec ma chum Maude (collègue pédagogue en science po) en visitant le plus de cégeps le long de notre route!



Cégep de Rivière-du-Loup, lieu mythique car mon père y aurait vraisemblablement vécu les plus belles années de sa jeunesse.

 Objectif: Cap-au-Renard. Population: euh... genre... une vingtaine de maisons.  Raison de notre visite: Myriam, une amie de Maude, y a loué une petite maison pour l'été afin de prendre le temps et l'espace pour vivre simplement, et rédiger ses travaux de fin de session.

Nous nous sommes donc retrouvé à cinq filles... oh! mais nous sommes tellement plus que cela! Plutôt.. cinq anarcho-féministes ''radicales'' - si l'on s'ose à l'étiquettage.  Cinq femmes intellos (nice!) cherchant à suivre le battement de leur coeur sur les sentiers de leurs réflexions.  Cinq penseures (oui oui) sachant pertinemment la sagesse du corps et le besoin urgent de l'intégrer dans la lutte.
Les opinions divergent, une éthique de la conversation et de la communication reigne.  Cinq femmes vivant ou ayant vécu l'expérience de la vie en collectif.  Des bonnes bouffes, et systématiquement, le partage des responsabilités pour que la vaisselle se fasse et que l'endroit demeure ce qu'on y recherche: l'espace, le temps, la liberté, la solidarité, l'inspiration.

Sommet du Mont Xalibu, Parc National de la Gaspésie.

Questions politiques à l'honneur: la souveraineté du Québec versus l'obsolescence du concept même d'État.  Centralisation et décentralisation, ordre et chaos, besoin des masses de déléguer versus oppression et violences systémiques comme fil conducteur de l'histoire telle qu'occultée par ceux qui l'écrivaient jusqu'à récemment.  La révolte et le corps.  Toutes nos relations, le polyamour, la sexualité et les apprentissages qui balisent notre aventure.

Top 3 des meilleures Saint-Jean-Baptistes de mon histoire: fête au village! Messe dans la petite chapelle suivie d'un repas de ''bines'' et pain, d'une heure ou deux de chansons populaires accompagnées à la cuillière, ET, pour clore le tout, d'une activité de danses en lignes!!
Ce qui me marque le plus, mis à part l'environnement sublime qui nous entoure, c'est l'humanité des gens, Gaspésiens... et néo-Gaspésiens.  Je songe aux voisins avec qui j'ai conversé, à ceux qui m'ont parlé de la vie aux abords de la mer-fleuve, de la maison qu'ils y ont bâtie, de la famille qui les a accompagné ou qu'ils ont laissé pour vivre au bout du monde, du climat, des hivers, de l'économie des régions, des saisons.  Mais ce qui m'emplit de grâce, ce ne sont pas tant les thèmes de nos conversations que l'énergie profondément authentique qui leur sert de courant. 
Comme si...
Ici, on a le temps et l'espace pour écouter.  Ça semble banal mais ce ne l'est pas.  En ville, on est si pressés (dans tous les sens du mots) qu'on ne sait plus comment se présenter, authentiquement.  Notre énergie appellée dans toutes les directions et on se sent bientôt morcellés, des ''dividus'' à prétendante d'in-dividus.  On se sait saturés mais on n'ose pas l'avouer, de peur de perdre le pas.  On sent le besoin de se vendre pour appartenir à quelque sphère d'existence. Parfois.



Lac aux Américains, Parc national de la Gaspésie.
Des hommes et des bêtes, mixité inspirante des à-peu-près-civilisés et d'un vénérable sauvage.


Phénomènes rencontrés à Cap-au-Renard: la lune géante du 23 juin, suivie du passage d'un banc de (centaines de?) bélugas... la pêche au Maquereau, le coucher de soleil sur l'horizon, la présence éternelle du vent et le mouvement des marées...



On a quitté Cap-au-Renard hier, Annabelle et moi, su'l pouce.  Chargée bien comme il faut, les doigts croisés pour qu'il ne pleuve pas.  Il vente en cibouleau sur la route 132, mais le feeling est bon: je parie qu'on se fera embarquer en moins de 15 minutes...

Et ... v'là!  Premier lift, un homme nous embarque à la sortie de Cap-au-Renard.  Il se nomme Tony, demeure à Matane mais travaille à Gros Morne dans un fumoir à poisson. Son quotidien: dormir trop peu, faire beaucoup de route, élever les deux enfants qu'il a adoptés .. ''eux, c'est mes trésors''. Lorsqu'il a quelques jours de vacances, il retourne dans la maison qu'il a construite à Gros Morne pour être seul avec la mer et rattraper du sommeil. 
''Ça vous dérange pas si je fume?'' 
Il fume la pipe depuis l'âge de douze ans. Il en aura bientôt 56. 
''Bien sûr que non.''  Faire du pouce, c'est se donner l'expérience de la gratitude.  Les hommes, les humains, on a beau les critiquer sans cesse; la générosité et l'entraide sont aussi des phénomènes réels.

Tony nous laisse à la moitié du chemin qui mène à Gaspé.  ''Ici dans le croche, ça devrait être un bon spot.  Soyez prudentes.''
''Que Dieu vous bénisse'' que je lui dit.
Accrochés à son rétroviseurs: un capteur de rêve et un crucifix.

Conversations sur le religieux, sur l'importance du mythe et le pouvoir du symbolique.  Conversations sur les mots et leurs représentations, sur les débats qu'il nous faut continuer de mener... pour voir s'ouvrir l'espace nécessaire à l'épanouissement de notre conscience et la création de liens solidaires.


À peine quinze minutes plus tard une autre voiture s'arrête devant nous sur le bord du chemin. 
''Je vous ai vues tout à l'heure'', nous dit le conducteur, '' mais j'étais avec ma femme et notre cochon dingue alors y'avait pas de place.''  Il ne se rend pas jusqu'à Gaspé.  Il s'en va au festival de la chanson de Petite Vallée.  Oh!  J'avais justement remarqué un poster dans la boulangerie de Ste-Anne-des-Monts. Je suis curieuse.  
''Vous avez frappé le bon gars pour vous parler du festival!  J'y ai travaillé comme technicien pendant 6 ans.  Le festival de Petite Vallée, c'est vraiment quelque chose de spécial...''




 Spécial tu dis?!  Je vous parle d'un petit village de 240 habitants... des Lebreux, des Côté, des Brousseau. ''La colonie'' - c'est le nom qui désigne le centre du village- n'a même plus la capacité de faire rouler sa petite épicerie locale. C'est comme ça sur l'ensemble de la péninsule: une économie précaire (saisonnière) et résiliante; des habitants au coeur chaud et de la bière qui coule à flot.

Mais Petite Vallée, cette semaine, c'est un coeur battant de fierté et de culture. Et pour nous, c'est la découverte d'un grand trésor caché. Ça fait 31 ans que le festival présente les grandes têtes d'affiche de la francophonie avec, en coulisse, le Camp chanson:
Unique en son genre, le Camp chanson de Petite-Vallée est le premier camp québécois spécialisé en chanson. Ayant pour mission d’offrir une formation sur mesure à tous les amoureux de la chanson, que ce soit au niveau de la technique vocale, de l’interprétation, de l’écriture que de l’accompagnement musical, le Camp chanson dispense des ateliers autant aux clientèles jeunesses qu’adultes.
Au-delà de la musique, Petite Vallée c'est une ambiance de fraternité et d'hospitalité. On avait décidé de rentrer voir le bistrot et d'y prendre une bière.  On y est restées deux nuits!

Appeler les locaux par leur nom, rigoler ensemble, partager la boisson, se faire raconter le lever du soleil sur la berge (le temps était à la pluie) et la fameuse chorale de 300 enfants Gaspésiens - de Matane à Gaspé - qui se préparent dans les écoles, depuis janvier, pour chanter tous ensemble les chanson d'un artiste invité (cette année, Laurence Jalbert) pendant le festival.  De quelque conversation que ce soit on retient la même impression et le même sentiment: l'événement génère une profonde fierté dans la communauté.  Et comment ce pourrait être autrement?  Ce sont les enfants de la communauté qu'on supporte, qu'on stimule, qu'on reconnaît dans leur force et leur beauté...



''Biel'', notre hôte. Un homme-ange qui véhicule absolument et probablement sans le nommer comme tel, l'esprit d'Aloha.

Nous sommes débarquées comme deux cheveux dans la soupe et aussitôt on nous a accueillies à bras-ouverts:  ''Vous pouvez planter votre tente là, à l'abris du vent d'Est et de la pluie. Vous laisserez vos sacs-à-dos dans le garage de Biel, pis si y fait trop froid, vous pouvez rentrer dormir dans le garage.  C'est chauffé au bois.''

On se serait crues dans le film La Grande Séduction...


Le festival de Petite Vallée se démarque aussi par la proximité, la simplicité, l'humanité, la mixité des entre artistes et festivaliers.  Personne n'est superstar, la célébrité laissée à la porte; tout le monde est juste content d'y être. Citation d'Annabelle: ''On pourra même dire qu'on a pitché du pop corn à Dan Boucher!''
Coup de coeur pour quelques artistes de la relève: D-TrackGaroche ta sacoche, Oli Vinégar, Philippe Brach, etc.  Coup de coeur pour un super show des Soeurs Boulay... intimiste, authentique (ce sont des filles du coin après tout)


Dernière chose: un emplacement et des installations splendides. Il y a la mer... puis la maison et le garage de Biel (ce dernier étant décoré exclusivement d'effigies Harley Davidson et Labatt 50!) l'auberge de la mère Lebreux, les petits chalets en bordure de la mer..  et finalement le bistrot qui est adjacent à la salle de spectacle -le ''théâtre de la vieille forge''-  et qui en fait abrite un véritable musée de la chanson!  Jamais vu un si bel éventail d'affiches commémoratives de nos grands, de Pauline Julien à Dédé Fortin, en passant par Félix bien sûr, mais aussi Marie-Claire et Richard Séguin, Plume, et et et... vous voyez le topo.


Il a fallu se déchirer de l'endroit car on y serait resté jusqu'à la fin des vacances.  Et du reste.. je ne peux tout simplement pas boire assez pour les suivre!



On a reprit le côté de la route 132.  Interrogation de mon intuition.... je paris qu'on se fera embarquer en 15 minutes encore une fois!
Eh... en effet.
Un gentil couple dans la fin cinquantaine, des Gaspésiens de souche ayant grandis dans la péninsule avant de s'exiler pour le travail... comme tant d'autres, ils sont revenus pour la retraite. Confortablement tassées sur les deux petits sièges amovibles du pickup, la discussion s'engage rapidement.  On (ou plutôt Annabelle, qui est remarquablement passionnée dès que l'on) parle de syndicalisme, de conditions de travail dans ''le système de la santé'' et de celles des travailleurs de la construction.

Débarcadère: la porte même de notre auberge: La Merluche.  Nous sommes à deux pas du cégep de Gaspé... sur lequel j'irai demain jeter un sort. ;) Conversations avec d'anciens étudiants de la Technique de plein air et aventure.. Je sens, je visualise, que j'aurais absolument ma place ici comme prof de philo. Je pourrais même louer une chambre à la Merluche (le spot est esthétiquement très plaisant, les proprios et le staff sont ultra sympathiques, et le bon temps y roule)!

Première soirée à Gaspé.  Bonne bouffe et vino suivis d'une promenade d'exploration de la marina.  Les étoiles sur le quai; une connexion grandissante et vivifiante... Au retour, rencontre de deux locaux sur la grève. Steeve et Guillaume, deux guitares, existentialisme de bord de feu de camp...

Le soleil s'est levé vers 5 heures du mat.


Une murale à Gaspé! :)


Un billet de blogue ne pourra malheureusement pas rendre l'ampleur des sentiments que je vis jour après jour.  Les interactions, les conversations, les sourires et les silences, l'énergie dans mon plexus solaire, les effluves sylvestres et l'air salé... 
L'espace ouvert devant.  L'esprit ouvert de tous côtés.  La pesée de concepts et d'idées, de visions et de questionnements.
L'histoire et les lubies de l'homme, nos craintes et nos deuils, et tout ce qu'il y a de créativité et de potentiel de communion et de grâce, dans chaque instant...