Maintenant sur la Côte d'Azur!
Côte effectivement azure! |
À la sortie de l'avion, hier après-midi, j'ai senti un relâchement, une détente de tout mon être. Le temps était doux, confortable... presque chaud. Mais il n'y avait pas que cela. Il y avait surtout ce sentiment d'être revenue à la maison: ma langue.
J'ai ainsi trimballé mes bagages, d'une navette à une autre, de l'aéroport jusqu'à la gare St-Charles, épuisée par une journée d'attentes de file en file, d'aéroport en aéroport, mais néanmoins portée par une douce joie, un sourire au visage...
Arrivée à la gare, toujours incrédule malgré l'évidence: tout le monde parle français! Je trouve le bureau d'information, déniche une carte de la ville, et poursuis ma route en direction de l'adresse de mon hôte 'couchsurfing', boulevard Longchamps.
Pardon? D'accord. |
Je sonne à la porte, on me répond. Pauline et Louise m'accueillent avec enthousiasme; elles m'offrent le thé. Comme elles l'avaient déjà établi dans nos correspondances, elles réitèrent qu'elles sont désolées: elles travaillent présentement sur un gros projet théâtral (elles font toutes deux l'école nationale) et n'auront malheureusement pas de temps à m'accorder. 'C'est tout bon' je leur réponds. ''Je voyage seule, j'ai l'habitude... je suis indépendante.''
''Moi je n'serais pas capable'' rétorque Pauline.
Ah? J'oublie souvent qu'il n'est pas si commun de faire ce genre de truc. Et je trouve cela fascinant de voir combien de personnalités différentes il peut y avoir dans ce monde!
Louise étudie son texte pendant un temps. Je prends une bonne douche chaude, me lave les rastas. Pour le souper, mon hôte propose de faire une quiche ''chèvre et épinards''. Couète et croissant!? Que je suis reconnaissante! En anglais, on dit ''I am gratefull.'' Je suis extrêmement gratefull! J'insiste pour l'aider à la préparation. On discute de bouffe, de théâtre, de musique. Elle retourne à ses études après le souper. Je retrouve mon écran.
Ce matin je suis partie me promener. Le centre-ville, le port, et tous les endroits qu'on m'a recommandés de visiter se trouvent dans un rayon de quelques centaines de mètres. Le temps est bon. Il y a des bouffées d'air salée. On parle français autours de moi! Une effluve de narguilé; je repense à Istanbul...
Je grimpe la colline et atteints la célèbre Basilique Notre-Dame-de-la-Garde, celle que les Marseillais appellent affectueusement La Bonne Mère. La montée est ardue, mais j'aime. Après tout, n'est-ce pas partie intégrale du pèlerinage?
La Bonne Mère se dresse, dorée et bienveillante, sur le site d'un ancien fort marin. |
Le site est marquant. La Vierge Marie monte effectivement la garde, surmontant la mer et la ville. À l'intérieur, une très belle murale au plafond, duquel sont suspendues des douzaines de bateaux. Marie protège les marins, Elle protège les Marseillais.
Je m'assieds en silence. Je médite longtemps.
Château d'If célèbre grâce au roman d'Alexandre Dumas 'Le comte de Monte-Cristo' |
D'une religion à une autre. |
Je redescends, un peu au hasard.
La journée est douce. Je marche, j'observe, j'écoute. J'essaie de m'impreigner de tout et de rien, d'être présente et ouverte. Or mon esprit se projète infatiguablement vers le futur; mon futur, mon privilège, mon karma et mon désir de redonner à la vie autant qu'elle m'apporte...
Il est temps de me procurer un roman! Cela m'aidera à sortir de la spirale.
Je déambule vers le quartier Belsunce, fredonnant l'intro de la chanson de Bouga intitulée ''Belsunce Breakdown''. Le rap Marseillais - et plus particulièrement celui de I AM, Akhénaton, Shurik'n, et toute cette école [celle du micro d'argent], c'est la trame sonore de mon adolescence. C'est pratiquement la raison pour laquelle j'ai choisie de visiter Marseille!
J'aboutie tout d'un coup dans une série de petites ruelles bien étroites et remplies de marchands. Ce doit être le marché arabe dont on m'avait parlé! Olives, fruits, pâtisseries, pizzas, viandes, épices, thés, tout y est. Le coin est bondé de passants - dont la plupart sont immigrants d'anciennes colonies - et le sol est recouvert d'eau, de déchets. J'aime bien. Pour un Euro, je goûte à une galette de pommes de terre aux épices.
Après le lunch, je continue ma balade vers l'autre rive du port, à l'affût d'une librairie et d'un quartier qui porte le nom Le Panier. Si je me souviens bien, c'est le quartier Italien de Marseille.
Bingo! Après quelques détours perdus dans quelques ruelles bien mignonnes, je tombe finalement sur l'endroit idéal: une terrasse de ''maison de thé & librairie''! Je souris, m'avance. Le temps semble s'être arrêté. Là, je suis vraiment à la maison!
Cup of Tea pour un bel après-midi! |
''Oh oui!'' déclare le proprio avec un grand sourire sympathique, ''Jacques Poulin, c'est mon auteur favoris!'' Je suis émue. ''J'adore le Québec,'' ajoute-t-il, ''et mon meilleur ami habite là-bas. Il est marié avec une Gaspésienne.''
On discute. Je cherche un livre mais il y en a trop, alors je lui demande de me conseiller. Il me suggère trois titres; deux sont des histoires se déroulant aux États-Unis. J'hésite. Un roman de Michel Tremblay, ça pourrait être drôle. Ça pourrait me préparer à la grande transition. Mais cette édition coûte un peu cher, alors j'opte finalement pour quelque chose d'autre. Un histoire de père de famille, de souvenirs, et de shamans Hopi.
Le proprio me raconte un peu Marseille. ''C'est une ville de rebelles. C'est ici qu'Arthur Rimbaud a choisi de mourir. On ne le dit pas assez, dans les écoles; mais c'est un fait important.''
J'aime bien ce type. Et quelle belle vie! Sa femme qui travaille à ses côtés, des amis qui passent, quelques touristes explorant le Panier, du bon thé, deux ou trois étagères de livres, de la bonne musique, une ambiance chaleureuse.
Je reste là pendant une heure ou deux, à lire, à écrire, à rire...
Ma langue! Comme je t'aime!
Est-ce vrai alors? Nous nous retrouverons bientôt pour vivre ensembles, comme jadis?
Ma langue! Je me sens si fébrile à l'idée de te redécouvrir, de te faire la cours encore une fois et pour toujours, avec humilité, et avec piété. De t'apprivoiser.
Je veux parcourir tes nuances et tes humeurs. Et qu'importe si je m'isole à te côtoyer! Ton élégance en vaut le coût.
Comme je suis impatiente! Et je prie, pour l'émancipation de mon esprit, afin de toujours savoir te rendre hommage, ma muse, ma belle langue! J'aimerais qu'ensembles nous puissions créer de belles histoires, pour la postérité, au nom des mystères que sont les femmes, les hommes, et leurs idées.
Avec toi, valser comme dans un grand bal, dans la cours du silence. Le temps d'une chanson. Le temps de ma vie.
Jeanne D'Arc, Église des Réformés |
Palais Longchamps. |
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